Chaque année, la nouvelle édition du Petit Robert de la langue française permet aux francophones du monde entier de découvrir les nouveautés de leur langue. Résolument vivante, celle-ci se renouvelle et s’enrichit en permanence pour nommer les réalités d’un monde en perpétuelle évolution.
Mots de société (surtourisme, afrodescendant, urbex…), mots de l’environnement (climaticide, agrivoltaïsme, bombe carbone…), mots liés aux sciences et aux nouvelles technologies (neuroatypique, un prompt, un vocal), mots des sports et loisirs, de la gastronomie ou encore de la francophonie, ce sont environ cent cinquante nouveaux mots, sens et expressions qui font leur entrée cette année dans le célèbre dictionnaire.
Voici notre « Top 10 » de ces nouveaux entrants.
1. surtourisme
On commence ce top avec un mot tout simple, dont le sens semble facile à deviner puisque le surtourisme désigne une présence touristique perçue comme excessive et nuisible. Ses conséquences sont nombreuses : dégradation de monuments historiques, surconsommation de ressources naturelles, perturbation des écosystèmes, explosion des prix du logement pour les locaux…
Ce mot, qui apparaît pour la première fois en 2010, est construit avec le préfixe sur-, qui marque l’excès et entre dans la composition de nombreux mots symptomatiques de notre époque : surproduction, surconsommation, surpêche, surmédicaliser…
Son usage n’a malheureusement pas cessé de croître ces dernières années. Il a notamment fait l’actualité récemment avec l’instauration, à Bali puis à Venise, d’une taxe pour les visiteurs, ou l’évocation de la construction d’une salle spécifique pour la Joconde au Louvre.
2. prompt
Si l’adjectif prompt, d’usage plutôt littéraire, existe en français depuis le XVIe siècle, le nom masculin un prompt est apparu beaucoup plus récemment. Utilisé dès les années 80 pour désigner un court texte invitant l’utilisateur à saisir une commande, le terme reste cantonné au domaine de l’informatique. Mais son heure de gloire est arrivée. Il connaît en effet une diffusion massive en 2023 avec l’essor de l’intelligence artificielle générative, en particulier de ChatGPT. Car il s’enrichit d’un nouveau sens : celui de « requête en langage naturel adressée à une intelligence artificielle générative ». Depuis, le mot est sur toutes les lèvres, car meilleur est le prompt de l’humain, meilleure est la réponse de la machine…
Gageons que, tout comme le prompt et l’intelligence artificielle frugale, qui font leur entrée cette année dans le Petit Robert, d’autres termes en lien avec l’IA rejoindront les prochaines éditions.
3. sapiosexuel
Si chaque être humain est un Homo sapiens, tout le monde n’est pas pour autant sapiosexuel ! Ce mot, apparu en français il y a une dizaine d’années, partage pourtant avec Homo sapiens une racine latine : sapiens, qui signifie « sage, intelligent ».
À la différence de l’hétérosexualité, l’homosexualité ou l’asexualité, la sapiosexualité n’est pas une orientation sexuelle à proprement parler. Une personne sapiosexuelle éprouve une attirance pour les personnes qu’elle perçoit comme brillantes, cultivées. Pour elle, donc, pas de crush sur la base d’une simple photo Tinder. Pour la séduire, il va falloir travailler son profil… et peut-être son orthographe ?
4. climaticide
Le suffixe -cide (du latin cædere qui signifie « tuer ») semble toujours productif, puisqu’après avoir servi récemment à former féminicide et écocide, le voici maintenant impliqué dans le climaticide.
Mais entre écocide et climaticide, quelle différence ?
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ces deux mots ne sont pas synonymes. Écocide est un nom masculin : une personne, un groupe commet un écocide, soit un crime contre l’environnement. À l'inverse, climaticide est avant tout un adjectif : une mesure, un projet peut être climaticide, c’est-à-dire que par ses émissions massives de CO2, il contribue au réchauffement climatique. Les bombes carbone, qui font aussi leur entrée dans le Petit Robert 2025, sont donc climaticides… mais on ne peut pas dire qu’elles commettent un écocide.
5. technosolutionnisme
Face aux défis écologiques et sociétaux auxquels nous devrons faire face dans les prochaines années, on peut avoir foi en l’humanité… ou faire plutôt confiance à la technologie. Le solutionnisme technologique, aussi appelé technosolutionnisme ou solutionnisme tout court, est une idéologie qui consiste à rechercher des solutions technologiques aux problèmes (sociaux, écologiques, etc.) sans en examiner les causes profondes.
Compter sur les véhicules électriques plutôt que sur la réduction des voitures, augmenter les capacités de nos corps avec des exosquelettes pour pouvoir travailler plus longtemps, disperser de la poussière lunaire dans l’espace pour protéger la Terre des rayonnements du soleil et limiter ainsi le réchauffement climatique… voilà quelques idées qui relèvent du technosolutionnisme.
Ce mot qui apparaît en 2013 a connu une forte progression ces dernières années, avec le foisonnement d’idées qui en relèvent.
6. espuma
Peut-être vous a-t-on déjà servi, au restaurant, un (ou une) espuma de betterave, de parmesan ou de fraise ? Cette préparation culinaire mousseuse, qui peut être aussi bien sucrée que salée, nous vient de la cuisine moléculaire. Le mot est directement emprunté à l’espagnol puisque c’est Ferran Adrià, un cuisinier catalan, qui aurait inventé et popularisé le principe. En espagnol, espuma signifie tout simplement « écume » ou « mousse (de bière, à raser…) », ce qui est plutôt amusant quand on sait que pour désigner la mousse au chocolat, l’espagnol a, à l’inverse, emprunté le mot mousse au français ! Échanges de recettes, échanges de mots !
7. escalade de bloc
Si vous êtes hypocondriaque et qu’un ami vous parle de bloc, ne paniquez pas : il ne s’agit pas forcément du bloc opératoire. Terme auparavant technique, réservé aux aficionados de l’escalade, l’escalade de bloc (aussi appelée bloc tout court) s’est largement popularisée. Il s’agit d’une escalade pratiquée sans baudrier ni corde, sur des parois de faible hauteur. Ce sport est ainsi accessible à tous, y compris en milieu urbain, où s’ouvrent depuis quelques années de très nombreuses salles de bloc. C’est également une discipline à part entière, que l’on retrouvera aux JO de Paris.
8. lithothérapie
Très en vogue depuis quelque temps, la lithothérapie (mot formé sur l’élément litho-, qui signifie « pierre » en grec), consiste en l’utilisation des pierres pour leurs propriétés thérapeutiques supposées. Certaines parapharmacies disposent même aujourd’hui de rayons dédiés à cette nouvelle pratique. Améthyste pour lutter contre le stress, lapis-lazuli pour augmenter la confiance en soi, malachite pour combattre l’arthrose… que l’on croie ou non en les vertus de la lithothérapie (dont aucune étude scientifique n’a, à ce jour, démontré l’efficacité), une chose est en tout cas certaine : grâce à elle, vous enrichirez déjà votre vocabulaire !
9. boss des bécosses
Voici une expression québécoise qui pourrait sembler presque poétique, avec sa double allitération en b et en s : boss des bécosses. Synonyme de petit chef, elle est fréquemment employée au Québec pour désigner une personne faisant preuve d’une autorité prétentieuse. Le sens de bécosses est, en revanche, moins poétique, puisque ce mot (issu de l’anglais backhouse) désigne dans la langue familière… les toilettes ! Le ou la boss des bécosses est donc en quelque sorte… un chef des cabinets.
Une expression familière si peu flatteuse que son usage a été banni à l’Assemblée nationale du Québec, après son emploi par une parlementaire de l’opposition pour qualifier le Premier ministre. Classe !
10. un vocal
Vocal, un néologisme ? Oui ! Car si l’adjectif vocal, qui fait référence à la voix, apparaît bien dès le XVe siècle, le nom masculin un vocal est beaucoup plus récent ! Formé par ellipse de un message vocal, devenu peu à peu, sans qu’on n’y prenne garde, un vocal tout court, ce nom désigne un message audio envoyé via une application de messagerie instantanée, si populaire depuis quelques années.
N’est-il pas réjouissant de constater que, pour désigner une nouvelle technologie, il n’est pas toujours nécessaire d’emprunter un mot à l’anglais ? Ni même de maîtriser le maniement des préfixes. Transformer un adjectif en nom : la néologie, c’est parfois aussi simple que ça !
Et si ce bref tour d’horizon des nouveautés de l’édition 2025 vous a donné envie d’en savoir plus, vous pouvez retrouver ici une sélection plus complète des nouveaux mots du Petit Robert 2025.
Nous vous invitons aussi à découvrir comment les mots entrent dans le Petit Robert, et qui sont les femmes et les hommes qui travaillent à l’actualisation de votre dictionnaire.
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