Emblématique de la culture populaire contemporaine (séries, littérature…), ce terme issu du verbe anglais to spoil « gâcher » s’est imposé en français pour désigner le « dévoilement » d’un élément clé d’une intrigue, gâchant l’effet de surprise.
Sans équivalent exact, il a fait l’objet de diverses tentatives de traduction : on retiendra par exemple le divulgâchis proposé par l’Office québécois de la langue française, résultat du divulgâchage infligé par le/la divulgâcheur/euse. Ce mot-valise composé de divulguer et gâcher peut faire sourire en français : il est probable qu’il n’arrive jamais à vraiment concurrencer le spoil, dont on a même tiré en français un verbe du premier groupe : spoiler (qui a rejoint Le Petit Robert en 2017).
L’efficacité de ce dernier réside sûrement dans sa brièveté, mais également dans sa proximité avec un autre mot français : le verbe spolier, avec qui il peut se confondre. Ce n’est pas sans raison : les deux partagent la même origine.
L’anglais to spoil « gâcher, ruiner » (XIVe siècle) provient en effet de l’ancien français espoillier « piller, dépouiller », descendant du latin spoliāre de même sens. Ce dernier a aussi été emprunté en parallèle sous la forme spolier « déposséder, dépouiller ». Son dérivé despoliāre est à l’origine de l’ancien français despoiller, d’où dépouiller. Dans la même logique, espoiller aurait pu donner un verbe français épouiller « ruiner, gâcher » dont on tirerait un équivalent français du spoil : l’épouille (de même que dépouille d’après dépouiller).
Pas sûr cependant qu’un « gare aux épouilles » remplace facilement un « attention aux spoils » !
On notera qu’en ancien français, espoille existe bel et bien, mais a le sens de « butin, dépouille (d’un ennemi) » : il donne le substantif anglais spoil « butin » (on préfèrera ainsi spoiler en anglais pour désigner notre divulgâchage). Il provient directement du latin spolium « prise de guerre », d’où dérive spoliāre. Son sens premier est « peau arrachée, cuir pris sur un animal ».
Le spoil contemporain ne nous arrache guère plus, heureusement, que l’élément de surprise !
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