« C’est une folie comme du tabac ; quand on y est accoutumée, on ne peut plus s’en passer », plaisante Madame de Sévigné à propos d’un parfum (1675).
Si le tabac fait fureur à partir du XVIIe siècle, cela n’a sans doute rien à voir avec la postérité du mot qui devient synonyme de succès vers 1878. Quel est le rapport entre le tabac et le monde du spectacle ? Dans le vocabulaire secret des gens de théâtre on dit plutôt avoir le gros tabac en 1900. Le tabac, ce sont les coups redoublés des applaudissements, c’est le bruit des mains frappées qui surpasse la « claque ». Car il s’agit bien d’une affaire de son, d’homophonie avec la racine tab- qui exprime l’idée de « frapper » dès le XVe siècle, comme dans tabut, « tumulte », et qui a donné tabasser.
Parallèlement, le mot tabac – l’herbe à fumer – prend vers 1800 le sens de « coup dans le nez » en argot ; on bourre bien le nez de poudre de tabac pour le priser, alors pourquoi ne pas nommer un chat un chat, et un « bourre-pif » « tabac » ? À l’arrivée, on obtient un mot qu’on orthographie « tabac » dans coup de tabac et faire un tabac, parce que c’est comme ça.
LE MOT DE STÉPHANE MARIE
Je ne vais pas refaire ici l’histoire du succès fulgurant rencontré par le tabac à pipe ou à priser, au cours des XVIe et XVIIe siècles. Succès beaucoup plus rapide que celui du thé et du café qui, eux, mettront plusieurs siècles avant de gagner tous les continents. Non, les tabacs que j’aime sont des plantes d’ornement. Elles ne se fument pas mais, en été, elles charment nos plates-bandes. Leurs noms ? Nicotina elata, N. afinis et enfin, à mes yeux, la championne ou N. sylvestris. Cette grande plante se sème au printemps en pleine terre, juste après les dernières gelées. Elle se développe alors très vite jusqu’à atteindre un mètre cinquante tout en déployant de grandes feuilles duveteuses, vert tendre. En été, elle produit de longues fleurs blanches tubulaires et étoilées. Comme les tomates, les tabacs sont des Solanacées dont toutes les fleurs sont étoilées. Durant quelques semaines, ce grand tabac des bois, souple au vent, sobre et élégant, trône au-dessus de ses camarades de plate-bande, histoire de faire un tabac.
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