Animal à quatre pieds qui hennit, & qui rend de grands services à l'homme. Il luy sert à la chasse, à la guerre, au labour & aux voitures. Un
cheval, pour estre bon, doit avoir trois parties correspondantes à trois de la femme, la poitrine, le fessier, & les crins, c'est à dire, poitrine large, croupe remplie, & les crins longs : trois du lion, le maintien, la hardiesse, & la fureur : trois du boeuf, l'oeuil, la narine, la jointure : trois du mouton, le nez, la douceur, la patience : trois du mulet, la force, la constance au travail, & le pied : trois du cerf, la teste, la jambe, & le poil court : trois du loup, la gorge, le col, & l'ouïe : trois du renard, l'oreille, la queuë, le trot : trois du serpent, la memoire, la veuë, le contournement : trois du lievre, ou du chat, la course, le pas, la souplesse. Les
chevaux ont du jugement, dit Solin, ils connoissent leurs maistres & leurs ennemis. Quelques-uns n'ont pas souffert que d'autres les montassent. Quelques-uns ont pleuré la mort de leurs maistres, & d'autres se sont laissez mourir de faim aprés les avoir perdus. Alexandre fit faire de magnifiques funerailles à son
cheval, il fit bastir une ville en son honneur, qu'il nomma
Bucephalie. Neron fit nommer son
cheval Consul. Les Tartares & les Turcs portent pour enseigne à la guerre une queuë de
cheval. Ce mot vient de
caballus, qui signifioit autrefois
cheval de bagage, ou
petit cheval qui servoit au moulin & aux voitures. Nicod, Isidore & Papias derivent celuy-cy
ex eò quòd ungulâ terram cavet.
Les Latins disoient en proverbe,
le cheval de Sejus, quand ils vouloient donner à entendre une chose qu'il est dangereux de posseder. C. Sejus avoit un de plus beaux
chevaux qu'on puisse voir : mais il n'en fut pas long-temps le maistre, ayant été tué par Dolabella. Ce même Dolabella s'étant emparé du
cheval, mourut bientost aprés. Cassius qui en fut ensuitte le maistre mourut dans une guerre contre les Parthes. Marc Antoine qui le posseda le dernier est assez connu par sa fin deplorable. Ce proverbe revenoit à un autre qu'ils avoient, qui étoit,
l'or de Thoulouse, dont l'on verra l'explication au mot
Or.
Le
cheval se nomme diversement suivant son poil, sa taille, son usage, ses vices ou maladies.
On dit un
cheval blanc, gris, pommelé, roux, bay brun, bay clair, bay doré, alzan ou alezan, bruslé, aubere,
cheval pie souppe de lait, isabelle, roan ou teste de more, mirouette, zain, balzan, &c. Tous ces mots & les suivants sont expliquez à leur ordre alphabetique. On a donné aussi aux
chevaux des noms propres, comme à celuy d'Alexandre,
Bucephale. Roland appelloit son
cheval, Mellentis ; & Regnault l'un des quatre fils Aymond appelloit le sien
Bayard.
A l'égard de la taille, on dit un
cheval nain, ragot, haut-jointé, court-jointé.
cheval entier, hongre, courtaut, coureur, roussin.
cheval d'Espagne, Barbe, guilledin, d'Angleterre.
cheval de manege, qu'en Latin on a appellé
campitor equus.
En considerant son usage, on dit
cheval de pas, de selle, de carrosse.
cheval à deux mains.
cheval de charrette ou de trait, ou d'attelage ; limonier.
cheval de charruë.
cheval d'amble ou haquenée.
cheval de poste, de loüage. On appelle
courbe de chevaux, deux
chevaux attelez ensemble pour remonter des bateaux.
cheval de haras ou étalon.
cheval de main.
cheval de parade, anciennement
palefroy.
On appelle
cheval de bataille, non seulement le
cheval fort & choisi qu'on reserve pour les grandes occasions ; mais encore figurément toutes les choses qui nous apportent quelque avantage dans quelque dispute où il s'agit de la gloire. Quand on prie un tel Auteur de dire quelques-uns de ses vers, il recite un tel Sonnet, c'est son
cheval de bataille. ce Musicien chante un tel air, c'est son
cheval de bataille.
A l'égard des defauts, on dit un
cheval vicieux, ombrageux, fort en bouche, fourbu, morveux, poussif, outré,
cheval qui est sur les dents, ruiné des jambes, qui est pesant à la main.
cheval refait & engraissé.
cheval neuf, fougueux & indompté, boiteux, borgne, ou deferré d'un oeuil. un
cheval chargé de ganache.
cheval vairon, begu.
Monter à
cheval, signifie non seulement, Monter en selle, mais encore, Apprendre le manege. Un tel Seigneur monte à
cheval chez un tel Escuyer, il sçait bien manier un
cheval.
On dit, Picquer un
cheval, pour dire, l'essayer. Promener un
cheval entre deux talons. Penser, ferrer, estriller, brider, seller un
cheval. Dresser un
cheval. Combat à
cheval. Bon logis à pied & à
cheval. On appelle un
bon homme de cheval, celuy qui sçait bien domter & manier un
cheval.
Tirer à quatre
chevaux est un supplice qu'on fait souffrir aux criminels de Leze-Majesté au premier chef, quand on les escartele par la force de quatre
chevaux attachez à chacun de leurs membres.
CHEVAU-LEGER, est un cavalier ordinaire & legerement armé, qu'on appelle autrement
Maistre, & qui est dans un corps de regiment. On l'appelle ainsi, par opposition aux Gens d'armes, qui étoient autrefois des gens pesamment armez & de toutes pieces. Il y a pourtant quatre compagnies d'ordonnances qu'on appelle particulierement
Chevaux-legers, qui n'entrent jamais en corps de regiment, qui sont les
Chevaux-legers de la Garde du Roy, de la Reine, de Monseigneur le Dauphin, & de Monsieur ; & on dit au singulier un
Chevau-leger, & au plurier vint-&-un
chevaux.
On se sert aussi du nom de
chevaux en general, pour designer la cavalerie, des gens de
cheval. Il y avoit dans cette armée trente mille hommes de pied, & dix mille
chevaux, c'est à dire, dix mille combattans à
cheval.
CHEVAL DE FRISE, en
termes de Fortification, est une grosse piece de bois percée & traversée de plusieurs picquets de bois ferrez, & longs d'environ trois pieds. Il sert à deffendre ou à boucher une breche. On en met aussi sur des rouës avec des feux d'artifice pour faire rouler en bas dans les assauts. Le Prince d'Orenge en faisoit des fermetures de camp, en les faisant accrocher les uns aux autres, à ce que dit Jean Errard.
On appelle
cheval de bois, une figure de
cheval qui se hausse & se baisse par le moyen de quelque chevilles de fer. Il sert dans le manege à faire les exercices pour voltiger.
CHEVAL PEGASE, est un
cheval que les Poëtes ont feint avoir des ailes, & avoir fait naistre la fonteine d'Hyppocrene en frappant du pied sur le mont Parnasse. Il servit de monture à Bellerophon quand il alla combattre la Chimere. Et depuis on a feint qu'il s'est envolé au Ciel, où il y a une Constellation de ce nom.
CHEVAL DE PACOLET, est un
cheval de bois fabuleux qui alloit dans les airs, & qui se conduisoit avec une cheville, dont il est fait une ample mention dans le Roman de Valentin & Orson, & autres.
CHEVAL DE TROYE, est un grand cheval de bois, par le moyen duquel les Grecs ont feint que Troye avoit été prise, ayant été introduit dans la ville comme une offrande à Pallas. Il y avoit plusieurs Grecs cachez dans le ventre de cette machine, qui en étant sortis, surprirent les habitans.
CHEVAL FONDU, est un jeu d'enfants, dont les uns sautent sur la crouppe des autres qui sont courbez.
En
termes de Blason, on appelle
cheval ou
poulain gay, celuy qui est peint nud, sans bride ni licol. Et on dit
cheval effrayé ou
cabré, quand il est peint rampant. On dit aussi
animé, pour exprimer que son oeuil est d'un autre esmail ; &
armé, en parlant du pied que la nature luy a donné pour se deffendre, quand il est aussi d'un esmail different. On le blasonne aussi
bardé, houssé, &
caparassonné.
CHEVAL MARIN, que quelques-uns appellent
hippopotame, ou
cheval de riviere, est un poisson qui a quelque apparence des
cheval. On a veu des dents de
cheval marin qui pesoient bien treize livres. On en voit beaucoup en Egypte & en Ethiopie. Le Pere Lobo en sa Relation d'Ethiopie dit, que le
cheval marin est tres-puissant, & n'a du
cheval que les oreilles, & presque tout le reste du veau, sans cornes. Il a les pieds d'élephant, & marche sur la terre, où il est presque toûjours à brouter, & nage à l'embouchure des rivieres. Il y a quelques-uns qui le décrivent avec des griffes aux pieds.
QUEUË DE CHEVAL, est une herbe qui croist en forme de joncs tres-durs & tres-rudes, dont les Artisans se servent à polir leurs ouvrages, qu'on appelle autrement
asprele, en Latin
equisetum, asperula.
FER DE CHEVAL, se dit en
termes d'Architecture civile & militaire, des ouvrages faits en rampe où on monte des deux costez, qui representent un fer à
cheval. Il y en a dans des maisons de campagne, & dans des dehors de quelques places, qui servent de demie-lune.
A CHEVAL, se dit adverbialement.
A cheval, à cheval, se dit quand on commande à la cavalerie de se mettre en état de combattre, ou de partir. On dit, Estre
à cheval sur un boeuf, sur un asne, sur un baston, sur un banc, sur un mur, quand on est jambe deçà & jambe delà sur quelqu'une de ces choses. Ainsi
St. Amand a dit,
Mon esprit à cheval sur des coquesigruës.
CHEVAL, se dit proverbialement en ces phrases. Il a changé son
cheval borgne à un aveugle, pour dire, qu'il a perdu sur un troc qu'il a fait, soit de
cheval, soit de toute autre chose. On dit, A
cheval donné on ne regarde point à la bouche, pour dire, qu'on reçoit les presents tels qu'ils sont : & ce proverbe se dit en Italien & en Espagnol de même :
A caval donato no si guarda nella bocca. On dit aussi, que l'oeuil du maistre engraisse le
cheval, pour dire, qu'il ne se faut point reposer sur les valets du soin de ses
chevaux, ni de même de toutes les autres affaires d'une maison. On dit d'un homme, qu'il n'a ni
cheval ni mule, pour dire, qu'il n'a aucune monture, qu'il est contraint d'aller à pied, qu'il est gueux. On dit aussi, qu'un homme est mal à
cheval, pour dire, qu'il n'est pas bien en ses affaires, qu'il est proche de sa ruine. On dit aussi, qu'un homme fait le
cheval échappé, quand il est libertin, emporté, incorrigible. On dit encore, Je luy feray voir que son
cheval n'est qu'une beste, pour dire, Je luy feray voir qu'il n'a pas raison. On dit aussi, qu'il est aisé d'aller à pied, quand on tient son
cheval par la bride, pour dire, qu'on souffre bien de petites incommoditez volontaires, quand on s'en peut delivrer si-tost qu'on le veut. On dit aussi, qu'il fait bon tenir son
cheval par la bride, pour dire, qu'il ne se faut point desaisir de son bien de son vivant. On dit aussi, qu'un homme monte sur ses grands
chevaux, pour dire, qu'il parle en colere & d'un ton hautain. On dit aussi, qu'un homme est bon
cheval de trompette, qu'il ne s'étonne pas pour le bruit, lors qu'il ne craint point les menaces ni les crieries. On dit aussi, qu'il parle à
cheval, pour dire, qu'il parle en maistre, avec autorité, ou qu'il parle bien à son aise. On appelle un homme fort grossier & stupide, un
cheval de carrosse, un
cheval de bast, un gros
cheval. On dit, Il n'est si bon
cheval qui n'en devinst rosse, pour dire, qu'on a fait travailler excessivement quelqu'un. On dit au contraire, que jamais
cheval gentil ne devint rosse, pour dire, qu'on monstre même en sa vieillesse des marques de ce qu'on a valu en jeunesse. On dit aussi, qu'il n'y a si bon
cheval qui ne bronche, pour dire, que chacun est sujet à faire des fautes. On dit encore, Des femmes & des
chevaux, il n'en est point sans deffauts. On dit, qu'un
cheval est chargé de maigre, qu'il revient de la Rochelle, d'un
cheval qui n'est pas gras ; par allusion à un poisson qui est commun à la Rochelle, qu'on appelle
maigue ; & aussi à cause de la disette qu'on avoit souffert à ce siege. On dit aussi, Jamais
cheval ni méchant homme n'amenda pour aller à Rome. On dit aussi, Il est bien temps de fermer l'estable quand les
chevaux s'en sont enfuis, pour dire, qu'il n'est plus temps de chercher des precautions, quand le mal est arrivé. On dit, qu'un coup de pied de jument ne fait point de mal au
cheval, pour dire, qu'un homme doit prendre galamment toutes les malices que luy font les femmes. On dit aussi, qu'à un
cheval hargneux il luy faut une estable à part, pour advertir, que quand on voit des grandeurs, il se faut separer de leur compagnie. On dit encore, que les
chevaux courent les Benefices, & que les asnes les attrapent. On dit, Aprés bon vin, bon
cheval, pour dire, qu'un homme qui a bien beu, fait bien trouver des jambes à son cheval. On dit pour se mocquer d'un train en desordre, C'est l'Ambassade de Viarron, trois
chevaux & une mule. On appelle une selle à tous
chevaux, une chose qui peut servir à plusieurs usages, en plusieurs occasions, comme des lieux communs, de certains discours generaux, &c. On dit aussi, qu'on a cherché quelqu'un à pied & à
cheval, pour dire, qu'on a fait toutes les diligences possibles pour le trouver. On dit aussi, qu'un homme bride son
cheval par la queuë, quand il commence par où il doit finir. On dit encore,
Cheval de foin,
cheval de rien :
Cheval d'avoine,
cheval de peine :
Cheval de paille,
cheval de bataille. On dit aussi, Qui aura de beaux
chevaux, si ce n'est le Roy ? quand on voit quelque chose de precieux entre les mains d'un homme riche. On dit d'un goinfre, d'un escornifleur, qu'il se tient mieux à table qu'à
cheval. On dit aussi d'un travail qui demande peu de genie, mais qui donne beaucoup de fatigue, que c'est un travail de
cheval. On dit aussi d'une medecine trop forte, que c'est une medecine de
cheval. On appelle à Paris
les Courtisans du Cheval de bronze, les filous & les personnes de mauvaise vie qui frequentent le Pont-neuf pour y attraper quelqu'un.