Arriver à un lieu éloigné d'un autre. Un Courier qui part de Rome,
vient à Paris, y arrive en huit jours. On dit à un amy qui arrive, Vous soyez le bien
venu. Venez çà, mon amy, approchez vous de moy. La ville
vint au devant du Roy à son entrée. L'Escriture dit que tout le mal
viendra du costé d'Aquilon. Il a été obligé de
venir en personne pour répondre sur cette accusation. Ce Prince est
venu en Cour.
VENIR, se dit aussi des choses inanimées qui ont du mouvement. Il
vient du vent par cette cloison. Voilà un orage qui
vient, qui se forme ; une nuée qui
vient à grands pas. Il luy est
venu une pleuresie pour avoir beu à la glace.
VENIR, signifie aussi, Atteindre, parvenir. Ce jet d'eau
vient jusqu'au second estage de la maison. Ces brodequins
vont jusqu'à mi-jambe. Ce nain ne me
vient que jusqu'à la ceinture. Cette histoire n'est pas
venuë jusqu'à nous. Il est
venu au dessus de ses affaires, il est
venu à bout de ses entreprises. Il est
venu à une grande fortune, à un haut point de gloire, il est bien parvenu.
VENIR, se dit figurément en choses spirituelles. Les inspirations
viennent du ciel. Il m'est
venu dans l'esprit une bonne pensée sur ce sujet. Cela m'est
venu en memoire. Les vers luy
viennent facilement, ils
viennent de genie. Ce secret n'est jamais
venu à ma connoissance. Cela est
venu aux oreilles du Prince.
VENIR, se dit aussi en choses morales. Le moyen de
venir à la perfection, c'est de vivre en retraitte. Son revenu ne
vient pas bien, il est embrouillé, on le paye mal. La mort est un mal inevitable, il en faut tous
venir là. Il est
venu à tel point d'extravagance, qu'il l'a fallu enfermer, qu'on a été obligé d'en
venir à la force, aux extremitez.
VENIR, se dit aussi à l'égard du temps, aussi-bien que du lieu, pour marquer qu'il n'y a pas long-temps qu'une chose est faite. Je
viens de chez vous ; je
viens du Palais. Il
vient de me parler. C'est un homme qui
vient d'être assassiné. Vous estes
venu assez à temps pour disner. Il est
venu à tard pour s'opposer à cette vente, elle étoit faite.
VENIR, signifie aussi, Naistre & croistre, prendre son origine. JESUS-CHRIST est
venu au monde pour nous racheter. Les enfans
viennent au monde avec le peché originel ; c'est de là que sont
venus tous nos maux, qu'ils prennent leur origine ; de là
vient qu'il y a tant de malice, de corruption, si peu de bonne soy dans le monde. Tous les enfans de cet homme ne
viennent pas bien, ils meurent jeunes, ou ne
viennent pas à terme. Il n'est
venu qu'un enfant de ce mariage. Les saules, les aulnes, ne
viennent bien que dans les lieux humides & marescageux. Les plantes
viennent de graine, de marcotte, de bouture. Le bled ne
vient point en l'Amerique, parce que la terre y est trop grasse. Le vin ne
vient point en Bretagne, parce que l'air y est trop froid ; le raisin n'y
vient point en maturité. La plus-part des mots François
viennent du Latin, ou du Grec ; les Espagnols de l'Arabe. Cela
vient maintenant à la mode. Cette phrase est
venuë en proverbe. On ne l'a point pressé de faire cette grace, cela est
venu de son propre mouvement, cela est
venu de son bon naturel.
VENIR, se dit en ce sens en choses morales. La raison
vient aux hommes avec l'experience. Cet ouvrage est bien fait, il
vient d'une bonne main. Cette nouvelle me
vient de bon lieu. Ce Gentilhomme
vient de bonne maison, il
vient en droite ligne des Comtes de Flandres.
VENIR, se dit aussi des choses qui se font fortuitement. Ces soldats ont tiré au billet, il est
venu à ce malheureux un billet noir. Il ne m'est rien
venu à la lotterie. Cet homme est
venu à mourir. Il
vint faute de luy, lors qu'il étoit en passe de faire fortune, avant qu'il fust
venu à bout de ses desseins. Le hasard voulut que nous
vinsmes à parler de cette affaire. On dit aussi, que les choses vont &
viennent, pour dire, tantost d'une façon, tantost de l'autre ; qu'elles sont tantost cheres, tantost à bon marché.
En
termes de Palais, on dit que des creanciers
viennent par contribution sur des meubles, quand ils sont colloquez & payez au sol la livre. On dit
venir à une succession de son chef, ou par representation ; y
venir par teste, ou par souches ; que des biens
viennent du costé paternel, ou maternel, selon qu'ils sont escheus par succession de pere, ou de mere ; que les biens
viennent aux heritiers du costé & ligne dont ils sont sortis, pour dire, que les paternels succedent aux biens du pere, & les maternels aux biens de la mere. On dit aussi,
venir contre un arrest,
venir contre son propre fait, pour dire, le contester, se pourvoir contre ;
venir à compte, pour dire, compter ;
venir à partage, pour dire, partager ;
venir à composition, pour dire, composer, relascher quelque chose de son droit. On dit aux Advocats qui plaident,
Venez au fait,
venez au point,
venez à la conclusion, pour dire, couppez court, abregez.
En
termes de Guerre, on dit
venir aux mains, pour dire, donner bataille, ou combattre. Trois escadrons
vinrent fondre sur nous. Les ennemis
venoient à la file l'un aprés l'autre. Les Heros d'Homere en
venoient aux injures & aux reproches, avant que d'en
venir aux coups, d'en
venir aux prises. Ces trouppes sont
venuës au secours de la place.
En
termes de Jeu, on dit, Laissez moy
venir cette main, faire cette levée. Je suis le dernier, je le verray
venir, je verray ce qu'il jouëra. Voilà un jeu qui luy
vient à souhait, il luy
vient le plus beau jeu des cartes.
VENIR, signifie encore, Diminuer, en ces phrases. Nôtre vin diminuë, ne
vient plus que goutte à goutte. Toute la succession de ce favori est
venuë à rien. Il avoit une bonne affaire, il est
venu des gens à la traverse qui l'ont fait
venir à neant.
VENIR, signifie encore, Estre convenable. Cette garniture
vient bien sur cette étoffe. Cet habit vous
vient à merveilles, comme s'il étoit fait pour vous. Ce surnom luy
vient bien, luy convient parfaitement.
VENIR. s. m. On dit, L'aller & le
venir, c'est double peine. On dit de celuy qui n'a pas trouvé la personne qu'il alloit chercher, qu'il a eu l'aller pour le
venir. On dit figurément de celuy à qui on a donné deux soufflets, qu'on luy a donné l'aller & le
venir. On dit
au Palais, un à
venir pour plaider, quand on signifie à une partie qu'on va poursuivre contre elle une audience à
venir au premier jour. On dit aussi adverbialement, Les siecles à
venir, c'est à dire, futurs.
VENIR, se dit proverbialement en un tres-grand nombre de phrases. On chante tant Noël, qu'il
vient, pour dire, qu'une chose arrive, quand on l'a long-temps attenduë. Cela
vient comme Mars en Caresme, pour dire, ordinairement. Cela
vient comme de cire, pour dire, fort juste, fort à propos. On dit aussi, De quel pays
venez-vous ? D'où
venez-vous ? à ceux qui ignorent une nouvelle connuë de tout le monde. On dit aussi à un valet qu'on envoye, Tant que vous irez &
viendrez, les chemins ne seront pas sans vous. On dit aussi, Voilà un beau
venez y voir, pour dire, C'est une chose peu considerable. On dit aussi, que les biens
viennent en dormant à ceux à qui il vient des dons, des successions, des biens qui ne leur coustent rien à acquerir. On dit aussi, Ce qui
vient par la fluste, s'en retourne par le tambour, pour dire, qu'on dépense facilement le bien acquis sans peine. On dit aussi, Au bon joüeur
vient la balle, pour dire, que nostre habileté nous fait trouver les occasions favorables de profiter. On dit que les maladies
viennent à cheval, & s'en retournent à pied. On dit aussi, qu'un malheur ne
vient jamais tout seul. On dit encore, Tout
vient à point à qui peut attendre, pour dire, qu'on vient à bout de toutes choses avec de la patience. On dit encore, Aprés la pluye
vient le beau temps. On dit aussi, qu'une chose est
venuë de la grace de Dieu, quand on ne sçait d'où elle
vient, ni qui l'a donnée. On dit aussi, Qui chapon mange, chapon luy
vient, pour dire, que les biens
viennent à ceux qui en ont dêjà. On dit aussi, C'est un homme qui est
venu de rien, qui est
venu tout en une nuit comme un champignon, pour dire, qu'il s'est enrichy en peu de temps. On dit aussi d'un homme surpris de quelque accident, qu'il est aussi estonné que si cornes luy
venoient à la teste. On dit aussi de celuy à qui il
vient quelque tentation, que l'eau luy en
vient à la bouche. On dit aussi, Aprés la panse
vient la danse, pour dire, que la bonne chere excite à la paillardise. On dit aussi, Il est
venu comme un tabourin à nopces, pour dire, fort à propos : & à contresens, Il est le bien
venu comme un chien dans un jeu de quilles. On dit aussi, qu'un homme est
venu la gueule enfarinée, pour dire, avec empressement & avec dessein de profiter. On dit aussi, qu'il s'en est allé comme il étoit
venu, pour dire, qu'il n'a rien fait de ce qu'il avoit envie de faire. On dit aussi, Faire
venir quelqu'un à jubé, le faire
venir à la raison, pour dire, l'obliger à faire quelque chose de raisonnable, & qu'on luy commande. On dit aussi, qu'un homme ne fait qu'aller &
venir, lors qu'il ne se tient point en repos, qu'il marche toûjours, ou bien quand il est peu de temps à faire quelque voyage.