Avoir ou porter un signe naturel de ce qu'on est, de ce qu'on doit estre, ou de ce qu'on a esté. La nature a
marqué cet enfant en un tel endroit. L'allure, le regard du lion,
marquent qu'il est courageux. La mine de ce Gentilhomme
marque quelque chose de grand,
marque sa naissance,
marque qu'il parviendra aux grandes charges. La santé de ce vieillard
marque encore son ancienne vigueur, sa bravoure. Du temps de François I. on disoit
marcher, au lieu de
marquer, qui vient de l'
Allemand marchen, qui en sa signification originaire veut dire
borner, d'où est venu le mot de
marche pour
frontiere, & le vieux mot François
marchir, pour dire,
confiner à quelques pays. Le mot de
Marquis en est aussi derivé, parce qu'il estoit autrefois commis à la deffense des frontieres ; & les qualitez de
Mareschal de Camp & de
Mareschal des Logis, qui signifient,
marqueurs de camp & de logement.
MARQUER, se dit aussi des impressions que font naturellement les corps qui pesent sur les autres, qui s'y attachent, qui les defigurent, & y laissent de leurs marques. Les vestiges des pieds qu'on voit sur la neige
marquent la qualité des animaux qui y ont passé. Cet homme est
marqué de plusieurs coups qu'il a receus à l'armée, d'une chute qu'il a faite, il en est tout defiguré.
MARQUER, se dit aussi figurément en choses morales. L'Apocalypse dit qu'il y avoit douze mille hommes dans chaque Tribu qui estoient
marquez pour predestinez. La liberalité
marque une belle ame.
MARQUER, signifie aussi, Mettre, appliquer une marque artificielle pour reconnoistre une chose. Les infidelles
marquent les esclaves au front. Les Marchands
marquent leurs ballots, leurs bestiaux, leurs bois. On
marque dans les forests le bois qu'il faut abattre en chaque couppe. On pretend aussi que le Diable
marque les Sorciers, qu'ils ont une partie du corps insensible.
On dit aussi, qu'un Ingenieur
marque l'assiette d'un camp, le dessein d'un travail, d'une fortification, quand il en designe les extremitez, par des piquets & autres marques. On dit de même, qu'un Arpenteur
marque les bornes d'un champ, quand il y met quelques marques, quelques enseignes, pour les reconnoistre. On dit aussi,
Marquer la tasche, la besogne d'un ouvrier, pour dire, le travail qu'il doit faire depuis un tel point jusqu'à un tel point.
MARQUER, signifie encore, Exprimer en particulier, specifier quelque chose, la faire voir en detail. Cet Advocat a bien
marqué toutes les circonstances de sa cause, de son fait. Ce Peintre a bien
marqué tous les traits de ce visage. Il
marque, il exprime bien les passions. On a
marqué expressément à cet Agent dans son instruction tout ce qu'il avoit à faire, à negotier. On ne luy avoit pas
marqué cela dans sa commission.
MARQUER, signifie aussi, Destiner à quelque usage.
Les Fourriers, les Mareschaux des Logis,
marquent les logements avec de la craye, pour loger la Cour, les troupes.
MARQUER. signifie aussi, Rendre tesmoignage. Les grands bastiments
marquent bien la puissance d'un Estat, la grandeur d'un Roy.
MARQUER, signifie aussi, Faire une empreinte, une marque par autorité publique.
Marquer la monnoye,
marquer la vaisselle d'or ou d'argent, au poinçon de Paris. On
marque l'estain fin par dessous, & l'estain commun par dessus l'ouvrage.
Marquer le vin dans les caves,
marquer le papier timbré,
marquer les cuirs, les toiles, les draps. Il y a des Officiers pour
marquer le fer doux, & le distinguer d'avec le fer aigre : & presque dans tous les mestiers & les privileges on
marque diversement les choses.
MARQUER, se dit aussi des choses qui rendent une personne odieuse, ou notée. On
marque, on flestrit les couppeurs de bourse d'une fleur de lis sur l'espaule. Cet homme est
marqué par une sentence infamante, il a déja esté repris. Il est
marqué sur le Livre rouge.
MARQUER, signifie aussi, Imprimer des caracteres particuliers sur quelque chose, & y mettre quelque signe pour la reconnoistre, pour s'en souvenir.
Marquer son linge, sa vaisselle, sa marchandise.
Marquer un texte, un passage en lisant.
Marquer son jeu, les points qu'on gagne au Picquet, au Triquetrac.
Marquer la chasse à la Paume.
On dit figurément, qu'une personne est
marquée au bon coin, pour dire, qu'elle a des marques exterieures de l'honnesteté, de la vertu, qu'elle possede en effet.
MARQUER, en
termes de Manege, se dit des chevaux qui ont une marque noire appellée
germe de feve, qui leur vient à l'àge d'environ cinq ans dans le creux des coings, & qui est effacée environ les huit ans ; & alors on dit qu'ils ne
marquent plus, & qu'ils rasent.
On dit figurément en ce sens d'une femme, qu'elle ne
marque plus, pour dire, qu'elle est vieille. On dit aussi, qu'un arbre
marque, quand il commence à pousser.
On dit proverbialement
marqués cette chasse, pour dire, souvenez vous de cette action, j'auray ma revanche. Il est comme les moutons de Bern,
marqué sur le nez. On dit aussi ironiquement à celuy qui a fort envie, de quelque chose qu'il ne peut avoir, que son fruit en sera
marqué.