Courir le jupon, le cotillon, ou la prétentaine sont autant de manières imaginées d’évoquer la recherche et la multiplication d’aventures galantes.
Il en est une autre plaisante et volontiers archaïsante, courir le guilledou.
Parmi les plus anciennes formes, courir le guildron voulait dire « courir l’aventure » et courir le guildrou « fréquenter de mauvais lieux ». Au XVIIe siècle, Furetière qualifie ce terme de burlesque et dit « qu’une femme qui court le guilledou lorsqu’elle se dérobe à son domestique [à son ménage], et qu’on ne sait où elle va, ce qui fait présumer que c’est en de mauvais lieux ». Une femme qui délaissait les affaires de sa maison ne pouvait que mal tourner ! Quant aux hommes qui courent le guilledou, ils fréquentent les lieux de débauche.
On a pensé que le mot dérivait de l’occitan aguillodo, correspondant au mot aiguillette, dont on connaît les connotations érotiques : c’était le lacet qui fermait la braguette. Il s’agit plutôt d’un composé de guil(l)er, « tromper, ruser », et de l’adjectif doux. Les dérivés régionaux de ce verbe conservent l’idée de séduction par la ruse. Conter guillette à une femme signifie « la séduire », de même que enguilbauder, qui se disait en Normandie et dans le Poitou. Dans la Somme, une guilebeute est une femme de petite vertu.
Le verbe courir, quant à lui, est à prendre au sens de « fréquenter assidûment », comme dans courir les magasins. Mais il est possible que le sens de « poursuivre, chercher à attraper » ne soit pas étranger à son succès, la langue, fort machiste, comparant volontiers la conquête amoureuse à une partie de chasse.
« Moi, je vous croyais des maîtresses à la douzaine, des danseuses, des actrices, des duchesses, rapport à vos absences […] Qu’en vous voyant sortir, je disais toujours à Cibot : Tiens, voilà monsieur Pons qui va courir le guilledou ! »
Balzac, Le Cousin Pons, 1847.
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