Faire quelque gain ou profit. Il a
gagné sur cette ferme dix mille escus tous frais faits. il a
gagné tant sur l'achat de sa maison. il ne faut pas retenir le salaire de ceux qui
gagnent leur pain à la sueur de leur corps. On demande à celuy qu'on louë, Que voulez-vous
gagner, c'est à dire, faire marché de ses gages.
GAGNER, signifie aussi, Vaincre, reduire, avoir avantage sur quelqu'un, tant au propre, qu'au figuré. Alexandre se rendit maistre de l'Empire des Perses par trois batailles qu'il gagna. un tel a
gagné le prix de Poësie, de la dispute, a
gagné son procés. il m'a
gagné une belle partie aux eschecs. il a
gagné de bon jeu. On dit aussi,
Gagner à la pointe de l'espée, pour dire,
Gagner avec grande difficulté.
GAGNER, signifie aussi, Se rendre maistre peu à peu de quelque chose. Les ennemis ont
gagné peu à peu le terrain. on
gagne le pied de la muraille. le feu commence à
gagner la maison voisine. l'eau les
gagne dans ce navire.
On dit en
termes de Marine, Gagner le dessus du vent, pour dire, Prendre l'avantage du vent sur son ennemi.
GAGNER, signifie encore, Atteindre, parvenir à quelque chose. Il faut
gagner pays tandis qu'il fait jour, nous aurons de la peine à
gagner le giste. il faut
gagner ce village pour regagner le grand chemin.
GAGNER, se dit en parlant du temps, pour dire, le mesnager, & faire viste quelque besogne. On le dit aussi pour éloigner quelque chose. Les criminels & les debiteurs ne cherchent qu'à
gagner du temps. cet Advocat a bien dit du galimathias, mais c'est qu'il vouloit
gagner l'heure, faire consommer le temps de l'audience sans qu'on pust rien juger.
On dit encore,
Gagner les devants, tant au propre, pour dire, Arriver le premier au logis, qu'au figuré, pour dire, Prevenir, preoccuper les gens dont on a besoin en quelque affaire, & s'assurer d'eux pour avoir leur suffrage, ou pour donner l'exclusion au competiteur.
GAGNER, se dit au figuré des choses spirituelles. On
gagne l'esprit des hommes par la douceur. un amant
gagne le coeur de sa maistresse par ses assiduitez. il a
gagné les voix, les suffrages de ses Juges par l'éloquence de son Advocat, ou par ses presens. il est aisé de
gagner les Indulgences, le Paradis. cet homme est si dur, si opiniastre, qu'on ne peut rien
gagner sur son esprit, ni par prieres ni par remonstrances.
GAGNER, se dit aussi en contre-sens, des desavantages qui arrivent en la poursuitte de quelque chose. Ce Capitaine a attaqué cette ville, mais il n'y a
gagné que des coups. il a bien couru pour avoir cette charge, mais il n'y a
gagné que la pleuresie. il a bien cageolle cette femme, & il y a
gagné du mal. il y a long-temps que ce pendart avoit
gagné la corde.
GAGNER, se dit proverbialement en ces phrases. Qui bien
gagne, & bien despend, n'a que faire de bourse pour serrer son argent. On dit des hommes & des chevaux, qu'on leur a bien fait
gagner leur avoine, quand on les a bien fait travailler. On dit, qu'on
gagne la gageure, quand on est venu à bout de ce qu'on avoit entrepris. On dit aussi,
gagner le taillis,
gagner la campagne,
gagner la guerite,
gagner le haut, &
gagner au pied, pour dire, S'enfuir. On dit aussi, Joüer au caquimbert, où qui
gagne perd. On dit aussi ironiquement, Je
gagne gros en cette affaire-là, pour dire, J'y perds, au lieu d'y
gagner. On dit encore, Il n'est pas Marchand qui toûjours
gagne, pour dire, que tous les Marchands sont sujets à perdre. On dit aussi, que du desrober au restituer on
gagne trente pour cent, c'est à dire, qu'on ne restituë jamais tout.
GAGNÉ, ÉE. part. pass. & adj. On dit aussi, Donner
gagné, pour dire, Quitter, ceder, ne vouloir point avoir de contestation.
On dit aussi proverbialement, Il croyoit avoir ville
gagnée, pour dire, Il croyoit estre maistre de cette affaire.