Trespas, decez, separation de l'ame d'avec le corps, qui termine la vie. Il y a une
mort naturelle qui se fait par des causes internes, & une
mort violente qui se fait par les causes de dehors, par quelque accident. JESUS-CHRIST s'est humilié jusqu'à la
mort, jusqu'à la
mort de la croix. Un Philosophe ne doit craindre, ni fuir, ni souhaitter, ni se procurer la
mort, il doit attendre la
mort en patience. Les Martyres ont couru à la
mort, ont bravé, ont affronté la
mort. Les Tyrans meurent ordinairement de
mort funeste, de
mort tragique : Il est à l'article de la
mort, entre la vie & la
mort, c'est à dire, à l'agonie. On prie Dieu qu'il nous delivre de
mort subite de male
mort.
En Astrologie on appelle la maison de la
mort, la huitiéme Maison.
MORT, se dit figurément en parlant de la separation du reste des hommes. L'Entrée en Religion est une
mort civile, mais Chrestienne & glorieuse. Une condamnation aux galeres ou au bannissement perpetuel, est une mort civile, mais infame & honteuse. Cette
mort retranche une personne de la societé civile, des honneurs du commerce du monde.
MORT, se dit hyperboliquement des douleurs qui menent à la
mort, ou qui fait languir & haïr la vie. Avoir toûjours la goutte, la pierre, c'est mourir d'une longue
mort. On luy a fait souffrir mille
morts. Ses enfans luy donnent la
mort. Cette affliction luy a mis la
mort au coeur. Je luy pardonne ma
mort.
MORT, se dit aussi de la peine qu'on a à faire quelque chose, quoy qu'assez legere. C'est une
mort que d'avoir affaire à des Advocats, à des gens qui ont trop d'affaires. C'est une
mort que d'aller querir de l'eau si loin. Quand on fait faire un message à ce laquais, c'est une
mort, il ne revient point.
MORT, se dit aussi en parlant de ce qui consomme beaucoup d'une chose. La friture est la
mort au beure, les besteraves la
mort au sel.
Mort aux rats, est de l'arsenic, du vrai poison, ou de l'aconit. On dit de celuy qui en a empoisonné un autre, qu'il luy a donné de la
mort aux rats. On appelle aussi de la
mort aux vers, la barbotine qu'on donne aux enfans qui ont des vers.
MORT, est aussi un
terme Poëtique & romanesque, pour exprimer une passion amoureuse. Un amant dit à sa maîtresse, qu'il meurt d'une douce
mort, qu'il est reduit aux abois de la
mort, qu'il ne cherche que la
mort ; que son absence est sa
mort, qu'elle avance, qu'elle precipite sa
mort.
Les Poëtes personifient la
mort, & en font une fausse Divinité, qu'ils peignent comme un squellet avec une faux & des griffes. La
Mort est sourde à nos cris. Il l'a arraché d'entre les bras de la
Mort. Hubert a fait un tres-beau Poëme appellé le
Temple de la Mort.
MORT, se dit aussi en Morale, en parlant des reflections qu'il faut faire sur elle. La
mort est une des quatre fins de l'homme, qu'il faut toûjours avoir devant les yeux. Il faut bien vivre pour faire une belle
mort. Heureux qui se trouvera juste à l'heure de la
mort. L'image de la
mort se presenta à luy avec ce qu'elle a de plus affreux.
Peres de la mort, sont des Religieux ou des gens devots qui vont assister les pestiferez.
On appelle
au Palais, peine de
mort, sentence, arrest de
mort, une condamnation à peine capitale. On tient que la
mort est la plus puissante des questions. On nomme un appellant de
mort, celuy qui a esté condamné par les premiers Juges à la
mort.
A MORT, se dit quelquefois adverbialement, il le hait
à mort. Il a esté blessé
à mort, jugé à
mort, executé
à mort.
MORT, se dit aussi odieusement avec menace, jurement & imprecation. Il est deffendu de jurer Dieu par la
mort, par la teste. Quelques-uns disent par adoucissement
morbleu, morbieu, ou
morgoy. On dit innocemment & populairement,
Mort de ma vie,
Mort non pas de ma vie.
MORT, se dit proverbialement en ces phrases. Aprés la
mort le Medecin, quand on s'advise à tard d'un remede, d'une precaution qu'il falloit prendre en une affaire. On dit aussi, de tant de douleurs on ne sçauroit faire qu'une
mort. On dit aussi, on trouve remede à tout, fors qu'à la
mort. On dit que la
mort n'espargne personne, que tout ce qui vit est sujet à la
mort. On dit aussi d'une amitié qui doit toûjours durer, c'est à la
mort & à la vie. On dit d'un agonisant, qu'il a la
mort sur les levres, qu'il a la
mort entre les dents. On dit d'un valet qui est long-temps à revenir, qu'il seroit bon à aller querir la
mort.
On dit aussi, que la
mort n'a pas faim, quand elle ne prend pas des miserables ou languereux.
MORT. Est aussi
subst. masculin. Ce Conquerant couvrit la campagne de
morts. C'est une oeuvre de misericorde corporelle d'ensevelir, d'enterrer les
morts. Une teste de
mort, un os de
mort. Il est devenu pasle comme un
mort. On dit quand un homme est tué, le
mort a toûjours tort. Les Romains brusloient les
morts, se persuadant qu'il importoit à l'ame que son corps fust bientost destruit. Ce qui dura jusqu'au temps de Macrobe, ou des Antonins. Les anciens Perses, au rapport d'Agathias, exposoient leurs
morts aux bestes, croyant que ceux qui demeuroient long-temps entiers avoient esté des Impies, & les parents du
mort regloient là-dessus leur joye, ou leur tristesse. Et les Grecs d'aujourdhuy se figurent que les corps des meschans ne se corrompent point dans le tombeau. Les Chrestiens ensevelissent & enterrent leurs
morts, & croyent que s'ils ne se corrompent point, c'est une marque de Sainteté.
MORT, se dit aussi des Fidelles dont l'Eglise fait commemoration. C'est un article de foy de croire que Dieu viendra juger les vivants & les
morts. La Feste des
morts a esté premierement celebrée par Odo Abbé de Clugny, comme témoigne Polydore Virgile. L'Eglise a approuvé le service, l'office des
morts, la messe des
morts ou de
Requiem. On sonne pour les
morts, afin d'exciter à prier Dieu pour eux. On dit aussi, qu'il ne faut point insulter à leur memoire.
On dit
en Jurisprudence, que le
mort saisit le vif, son plus prochain heritier habile à luy succeder, pour dire, qu'un heritier se peut mettre en possession des biens d'un deffunct de son authorité privée, sans implorer celle de la justice ; au lieu qu'un Legataire Universel ou particulier s'y doit pourveoir pour avoir delivrance de son lege.
MORT, se dit proverbialement en ces phrases. Un chien vivant vaut mieux qu'un lyon
mort, dit l'Escriture. On dit aussi, Plus de
morts, moins d'ennemis. Un chien
mort ne mord plus. On dit aussi des choses qu'on ne trouve que rarement, la mere en est
morte. On appelle aussi le tombeau, le Royaume des
morts, le Royaume des taupes. On dit aussi de celuy qui desjeune avant que d'aller à la Messe, qu'il va à la Messe des
morts, qu'il y porte pain & vin. On dit qu'un homme est
mort de la
mort de Roland, pour dire, qu'il est
mort de soif, parce qu'en l'an 775. le jour de la bataille de Roncevaux, Roland General de l'Empereur Charlemagne s'estant eschauffé & alteré, mourut faute de trouver de l'eau pour se rafraisschir.