Qui est naturel & essentiel à quelque estre. Les Philosophes distinguent quatre sortes de
propres : le premier, qui convient à une seule espece, mais non pas à tous les individus, comme d'estre Geometre, Medecin, Philosophe, c'est le
propre de l'homme, mais non pas de tous : le second, qui convient bien à toute l'espece, mais qui convient aussi à quelque autre, comme d'avoir deux pieds, est
propre à l'homme, mais il est
propre aussi à l'oiseau : le troisiéme, qui convient à une seule espece, mais non pas en tout temps, comme d'avoir les cheveux blancs, est
propre seulement à l'homme, mais au vieillard : le dernier, qui convient seulement à une espece, à tous les individus, & en tout temps, comme la faculté de rire est
propre à l'homme, le hennir aux chevaux, &c. & c'est celuy-là que Porphire appelle le
vray propre.
PROPRE, se dit en Morale de ce qui se trouve ordinairement dans les choses, de leurs vertus particulieres. C'est le
propre de Dieu d'estre bon & misericordieux, de pardonner. C'est le
propre des esprits foibles d'estre lâches, peureux & vindicatifs. C'est le
propre des gueux enrichis d'avoir de l'orgueil. C'est le
propre des jeunes gens d'être estourdis, emportez & débauchez. Nous ne faisons presque rien que nous n'y soyons portez par l'amour
propre.
PROPRE, se dit aussi des qualitez naturelles & necessaires pour reüssir à quelque chose. Les gens qui sont d'un temperament chaud & bouillant sont
propres pour l'armée. Les froids & melancholiques sont
propres à l'estude. Il y a des gens qui ne sont
propres à rien qu'à boire & manger.
PROPRE, se dit aussi de ce qui est destiné à un certain usage. Voilà du gros bois
propre à bastir. Ce moilon est
propre à faire des fondemens. Le saint leu n'est
propre qu'à mettre à l'air au haut des maisons. Chaque animal sçait choisir l'aliment qui luy est
propre. L'aimant est
propre à frotter l'aiguille d'une boussole.
PROPRE, se dit aussi de ce qui est convenable. Il luy faut essayer cet habit pour voir s'il luy sera
propre. Ce quadre sera
propre à ce tableau. Cette loy est
propre à nostre espece, luy convient parfaitement. Cette doctrine n'est pas
propre à estre soustenuë en public. C'est le
propre d'un ignorant, de vouloir parler de tout à tort & à travers. Cela n'est pas en son
propre lieu.
PROPRE, se dit aussi de ce qui est bien net, bien orné. Voilà un appartement bien
propre, des meubles bien
propres, un habit fort
propre. Il faut estre
propre sur soy, en son boire & en son manger.
PROPRE, en
termes de Grammaire, se dit des noms & des mots. On distingue les noms
propres des noms appellatifs. Chez les Chrestiens le nom
propre est celuy qui est imposé au Baptême. On l'estend quelquefois aux noms de famille. Les Dictionaires communs ne se chargent gueres des noms
propres. Il faut avoir recours au Dictionaire Poëtique pour chercher les noms
propres. Voilà un mot
propre pour signifier une telle chose. Ce mot n'est pas
propre, mais figuré ou metaphorique.
PROPRE, est quelquefois reduplicatif, & sert pour affirmer & marquer plus precisément quelque chose. JESUS-CHRIST est venu nous racheter en
propre personne. Dieu avoit gravé les tables de la Loy de sa
propre main. Nous avons veu son Verbe de nos
propres yeux. Cette lettre a été donnée en main
propre. Le Pape confere quelquefois des Benefices de son
propre mouvement. Il a levé la main sur son
propre pere. Voilà la clause en ses
propres termes.
PROPRE, se dit aussi de ce qui appartient à quelqu'un, de ce dont il peut disposer. Un Moine Profez n'a rien de
propre, qui soit à luy en
propre. Il faut faire l'aumône de son bien
propre, & non pas de celuy d'autruy. Il a été condamné à payer en son
propre & privé nom. On peut user du bien de ses amis comme du sien
propre.
PROPRE, en
termes de Jurisprudence Françoise, est opposé à
acquest ou
conquest. C'est un heritage qui est venu par succession du pere ou de l'ayeul, & qu'on n'a point acquis par son industrie. Un Testateur ne peut disposer que de ses meubles & acquests, & du quint de ses
propres. Les parents paternels heritent des
propres paternels, & les maternels des
propres maternels.
On appelle un
propre ancien, celuy qui a fait souche dans la famille, qui vient de l'ayeul, ou trisayeul ; un
propre naissant, celuy qui n'a point fait souche. Un acquest du pere est un
propre naissant en la personne de son fils. Il y a aussi des
propres qui se font par stipulation d'une dot qui consiste en argent. On en fait entrer une partie en communauté, & le reste tient lieu de
propre à la femme & aux siens. On stipule aussi le remplacement des
propres.
On dit proverbialement d'une personne sale & maussade, qu'elle est
propre comme une écuelle à chats.